30/07/1973 : Quic en Groigne

Un petit bateau de pêche de la région de Gaspé (Canada), après avoir été transformé en yacht était devenu le bateau de rêve d’un jeune couple français qui avait projeté de traverser l’Atlantique. Le petit bateau était parti de Chicoutimi (Canada) pour Saint-Malo en France. Se trouvant sur les Bancs de Terre-Neuve depuis plusieurs jours avec du calme et une grosse houle, les deux occupants étaient très fatigués, en particulier la jeune femme. Le capitaine armateur du « Quic en Groigne » décida d’abandonner le voyage transatlantique et mit le cap sur Saint-Pierre et Miquelon.

Pans la nuit du 30 juillet vers deux heures du matin, par une brume épaisse, il se trouvait à quelques milles seulement dans le 145° de Galantry. Il se dirigea sur la sirène du phare qui fonctionnait régulièrement, avec l’intention de trouver du temps clair en arrivant près de la terre, ce qui lui permettrait de franchir la passe du Sud-Est. L’homme propose mais les éléments disposent. Près de la terre la brume était aussi épaisse qu’au large avec en plus la noirceur de la nuit.

Soudain le petit bateau s’immobilisa, il venait de s’échouer assez doucement sur des rochers. Il n’y avait qu’un très faible ressac, ce qui permit à l’homme de débarquer et de gravir un petit talus. Brusquement il se trouva dans un cimetière parmi les tombes. Ce cimetière était celui de l’Ile aux Marins. Il suivit un petit sentier qui le mena aux premières maisons du village. Il frappa à la porte de plusieurs d’entre elles, mais personne ne répondit à son appel pour la raison que toutes ces maisons étaient inhabitées. Dépassant l’église du bourg il s’engagea dans le petite rue et en désespoir de cause il frappa de nouveau à la porte d’une maison.

Cette fois son appel avait été entendu par la famille Téletchéa de l’Ile aux Marins. Les deux garçons qui étaient des pêcheurs se levèrent immédiatement et quelques minutes après avoir été mis au courant, se dirigèrent très vite sur les lieux de l’échouage où ils récupèrent l’épouse du naufragé. Ils l’amenèrent chez eux où leur mère la réconforta et leur donna à manger. Quand le jour fut venu les frères Téletchéa armèrent leur doris et ramenèrent les naufrages à Saint-Pierre avant d’aller sur les lieux de pêche.

A l’aube le bateau-pilote renfloua le petit bateau et le remorqua dans le port. Le bateau n’avait subi que de faibles dégâts. Il fut réparé et resta passer l’hiver à Saint-Pierre. L’annee suivante, les propriétaires revinrent chercher leur bateau et repartirent avec au Canada.

27/03/1973 : Kimolos

Le cargo grec de 7 891 tonneaux se trouvait le 27 mars 1973 sur la rade de Saint-Pierre au mouillage. Ce navire avait un équipage de 32 hommes et il avait également à son bord deux passagers. Il était ancré sur la rade de Saint-Pierre où il procédait à des transbordements de poissons en provenance d’un navire usine japonais.

Le capitaine du « Kimolos » étant dans l’ignorance de plusieurs bulletins météorologiques annonçant une dépression équatoriale remontant de la mer des Caraïbes. Des vents violents de Nord-Est accompagnaient cette dépression. Ces vents sont les plus dangereux pour un navire qui se trouve sur la rade de Saint-Pierre à cause des vagues très courtes et très dures qu’ils provoquent sur les petits fonds. Ces vents de Nord-Est étaient accompagnés de fortes bourrasques de neige diminuant sensiblement la visibilité.

Le « Kimolos » qui n’avait à son bord que très peu de lest était très haut sur l’eau et le vent avait beaucoup de prise sur ses superstructures. De plus le navire qui avait une forte « touée » sur ses deux ancres louvoyait énormément sur ses chaînes. Le navire commença à chasser en direction d’un plateau rocheux nommé le « Flétan ». Vers 17 heures ce fut l’échouage sur les rochers.

Au début de la dérive de son bateau le capitaine tenta d’actionner sa machine, mais il n’y parvint pas. Quelques heures seulement après l’échouage, le spécialiste en la matière, le vétéran Walter Partridge arriva sur les lieux avec toute son équipe, et les travaux de renflouement commencèrent. Une partie de la cargaison fut retirée du bord et une partie avariée par l’eau fut jetée à la mer. Les brèches de la coque furent colmatées et le jour où la marée atteignit son niveau le plus élevé, avec l’aide d’un puissant remorqueur venu d’Halifax, le « Kimolos » fut renfloué.

Le navire fut remorqué à Halifax, réparé sommairement et remorqué en Angleterre pour y subir d’importantes réparations. Ce bateau neuf plus favorisé que beaucoup d’autres continue actuellement ses voyages autour du monde.

15/01/1973 : Cap Brulé

Photo. Lucien Girardin-Dagort

Seulement quelques semaines après son lancement le chalutier « Cap Brulé » appartenant à la Société « National Sea Products » disparaissait sur les « Veaux-Marins », ces écueils très dangereux situés à 6 milles du Cap Blanc de Miquelon, où avait disparu le 6 octobre 1841 le brick de guerre français « La Vedette ». Ce chalutier moderne fut construit au chantier de Marystown, petit port de la côte sud de Terre-Neuve.

Le 15 janvier vers trois heures du matin, le vent soufflait du ouest-sud-ouest avec une vitesse de 35 milles à l’heure. La température était de l’ordre de -20° Celsius et la visibilité était très réduite à cause de la neige. Le « Cap-Brulé » trainait son chalut dans l’ouest de Miquelon. Une erreur de navigation le fit s’échouer sur les « Veaux-Marins ».

Il était impossible de songer à mettre une embarcation de sauvetage à la mer, car la proximité des rochers sur lesquels déferlait la mer, rendait cette opéération très dangereuse. Le chalutier ne pouvait établir aucun contact radio car ses générateurs, source d ‘énergie électrique, étaient noyés. Une seule chance existait pour les naufrages. Elle consistait à utiliser un petit appareil walkie-talkie.

L’appel fut lancé avec ce minuscule appareil. Ce fut presque miraculeux qu’il soit parvenu aux oreilles d’une auditrice de Miquelon Madame Louise Detcheverry, qui avisa immédiatement les autorités responsables. L’alerte fut donnée et les messages partirent en direction de la base de Summerside dans l’île du Prince Edouard. Cette base envoya immédiatement un hélicoptère qui sauva l’équipage et le ramena à Miquelon, puis ensuite à Terre-Neuve.

Ce magnifique bateau de pêche termina sa courte carrière sur ces dangereux rochers où il fut mis en pièces en quelques jours. Il est à noter que le capitaine du « Cap Brulé » était second officier au moment du naufrage du « Zaandam » dans la rade de Miquelon.

20/01/1972 : Zaandam

Ce jour du 20 janvier 1972, un vent très violent de 60 milles soufflait du nord-ouest et la température était de l’ordre de -l0° Celsius. Plusieurs bateaux, en particulier des chalutiers étaient venu se mettre à l’abri dans la rade de Miquelon. Parmi ces bateaux se trouvait le chalutier canadien « Zaandam » d’une longueur de 50 mètres, construit en 1965, ayant un tonnage de 667 tonnes. Le « Zaandam » était la propriété de la Société Fishery Products Company ayant son siège à Burin, petit port de la côte sud de Terre-Neuve.

Le Zaandam faisait front très facilement à cette tempête en maintenant son étrave dans le « lit » du vent, son moteur au ralenti lui permettant d’avancer très lentement et il aurait pu certainement attendre la fin de la tempête si les événements ne s’étaient pas précipités.

Le moteur s’arrêta subitement de fonctionner et malgré les efforts déployés par les mécaniciens, le moteur ne démarra pas. Le « Zaandam » dériva et il s’échoua avec force sur un plateau rocheux dénommé « La chatte ». Les pêcheurs de Miquelon avaient suivi le déroulement des événements. Deux doris furent mis à la mer, malgré le vent furieux et malgré la violence du vent, réussirent à accoster le long du « Zaandam ». Pendant leur séjour le long du bord les deux doris tossèrent dur et l’un d’eux eut de graves avaries. Néanmoins ils recueillirent l’équipage et regagnèrent la terre à la grande joie des naufragés et des habitants de la localité qui étaient accourus sur le rivage.

Le « Zaandam » fut considéré perte totale. Sa carcasse est toujours visible pour le voyageur qui arrive à Miquelon.

21/11/1971 : Pena Castillo

Très tôt le matin du 21 novembre le chalutier espagnol « Pena Castillo » âgé de quatre ans, et d’un tonnage de 480 tonneaux avec son frère jumeau le « Guernika Ko Arbola » quittait le port de Saint-Pierre pour leur dernier voyage sur les Bancs de pêche avant de partir pour l’Espagne peu avant Noël.

Le « Pena Castillo » sortit le premier du port et après avoir débarqué le pilote, se dirigea vers le large. Quelques minutes plus tard le « Guernika Ko Arbola » à bord duquel se trouvait le pilote Jean Reux, capta un message du « Pena Castillo » annonçant qu’il venait de toucher sur un haut-fond, qu’une partie de sa quille était enlevée et qu’il menaçait de couler rapidement. L’équipage abandonna le bateau, dont l’avant flottait encore grâce à ses ballasts, alors que l’arrière était déjà complètement submergé.

Le pilote Jean Reux et son matelot Georges Franché se dirigèrent très rapidement sur le lieu présumé du sinistre, mais ils ne trouvèrent aucune trace du chalutier et de son équipage. Cela ne les découragea pas car tous deux étaient des marins valeureux et expérimentés et ils continuèrent activement leurs recherches. L’œil fixé au radar ils inspectaient la mer avec beaucoup d’attention mais les recherches étaient très difficiles à effectuer, d’une part à cause de la brume épaisse, d’autre part à cause de tous ces « cailloux » qui gisaient dans le secteur et parmi lesquels il était très difficile de détecter de petites embarcations de sauvetage. Se fiant plus à leur instinct de marin qu’aux indications données par le radar, ayant tous deux une parfaite connaissance des lieux, ils se dirigèrent vers l’Ile Pelée (extrémité méridionale de l’Ile aux Vainqueurs).

Leur flair ne les avait pas trompés. Ils découvrirent avec terreur les trois petits canots à quelques mètres seulement des terribles brisants. Ils manœuvrèrent rapidement et réussirent juste à temps à retirer des dangers les naufragés voués à une mort certaine sans leur intervention. Tous les pêcheurs côtiers de Saint Pierre, en particulier ceux de l’Ile aux Marins, connaissent les dangers que représentent les alentours de l’Ile Pelée, par une mer houleuse et brume épaisse.

Le sauvetage des marins espagnols, effectué par Jean Reux et Georges Franché dans de telles conditions doit être considéré comme un exploit et rester dans la mémoire des jeunes générations. Au moment de l’embarquement dans les canots on constata la disparition du patron de pêche. Quelques jours plus tard l’épave fut repérée à environ 500 mètres dans le 138° près de l’île Pelée, gisant par 35 mètres d’eau.

Le 4 décembre 1971 les deux plongeurs Messieurs Prudence et Cordon penétrant à l’intérieur de l’épave du « Pena Castillo », retrouvent et ramènent le corps du marin disparu dans le naufrage de ce bateau le 21 novembre précédent. En reconnaissance de leur acte courageux le Gouvernement espagnol décerna aux deux braves marins Saint-Pierrais Messieurs Reux et Franché, la médaille de sauvetage le 25 novembre 1972.

La cause présumée du naufrage du chalutier fut une erreur de route dont doit être tenu responsable le girocompas.

18/05/1971 : Transpacific

Photo. Lucien Girardin-Ozon

Les naufrages ne sont pas pour nos îles des histoires du passé. En dépit des perfectionnements que les hommes ont apportés dans l’art de la navigation par tous les temps, de l’équipement mécanique et électronique dont sont dotés la plupart des navires, en dépit également du niveau d’instruction plus élevé des officiers par rapport à leurs anciens, les marins rencontrent encore de nos jours sur l’immense champ de bataille qu’est la mer, ces vieux ennemis séculaires que sont le vent, la houle, le froid, la neige et encore plus souvent qu’on pourrait le croire, les rochers de certaines côtes inhospitalières.

Voici, raconté dans les lignes qui suivent l’histoire d’un magnifique cargo allemand de dix-sept ans d’âge, le « Transpacific », de 3,865 tonnes de jauge brute, commandé par le capitaine au long cours H. Sperling et appartenant à la « Poseidon Line » de Hambourg.

Ce vapeur avait quitté le port de Port-Alfred sur la Rivière Saguenay, près de l’estuaire du fleuve Saint-Laurent. Il avait une cargaison de barres d’aluminium, des marchandises diverses et également une grand quantité de billes de bois précieux entrant dans la fabrication du contre-plaqué de qualité supérieure. Le « Transpacific » avait également à son bord onze passagers. En descendant le golfe Saint-Laurent, le navire eut des problèmes avec ses appareils de détection radar et également des troubles dans son équipement Decca. Le capitaine Sperling envoya un message radio à Saint-Pierre où il demandait que des techniciens viennent à son bord pour procéder à la réparation des appareils. Le « Transpacific » devait rester mouillé au large du port.

Au moment de l’atterrissage une brume épaisse recouvrait l’archipel. Plusieurs doris en pêche au large de Galantry virent soudain apparaître au milieu d’eux perçant la brume, un gros vapeur dont la route ne leur sembla pas bonne. La côte est de l’île Saint-Pierre est parsemée de « cailloux » isolés à plusieurs milles de la terre ferme. Craignant de voir ce navire s’échouer sur un de ces dangers, les doris tentèrent d’avertir le navire en lui coupant la route mais ils n’y parvinrent pas, car le bateau filait à une vitesse nettement supérieure à la leur qui était d’environ sept noeuds.

Pendant ce temps le bateau-pilote ayant à son bord les techniciens ne trouva pas le « Transpacific » au rendez-vous convenu. Le bateau-pilote adressa un message radio au vapeur. Le capitaine Sperling répondit aussitôt que son navire venait de s’échouer, mais que cet échouage n’avait aucun caractère de gravité et qu’il était convaincu qu’il se retirerait lui-même des cailloux. Le capitaine ignorait totalement où il se trouvait, car s’il l’avait su, il eut été moins optimiste. Le lieu de l’échouage était la « Basse à Marie-Rose », véritable nid de cailloux, situé à quelques centaines de mètres au sud de l’île aux Marins.

En fin d’après-midi, le « Transpacific » essaya avec sa machine en arrière toute de se dégager des cailloux, mais cette tentative se solda par un échec. Les autorités maritimes locales responsables venues sur les lieux de l’échouage, estimèrent que le renflouement du navire était impossible par ses propres moyens. Le capitaine décida de débarquer ses passagers et son équipage. Il resta à bord avec trois officiers.

La nouvelle de cet échouage arriva très vite aux oreilles du Capitaine Finch qui dirigeait l’entreprise de sauvetage « Mil Tug and Salvage » du port de Halifax, qui envoya immédiatement à Saint-Pierre le puissant remorqueur de haute mer « Foundation Vigilant ». Le capitaine Petersen, résident à Montréal en tant que capitaine d’armement de la Poseidon Line et le capitaine Georges L. Hayes expert de la Société de sauvetage Hayes, Stuart and C0 Limited s’envolèrent de Montréal pour Saint-Pierre. En arrivant à Sydney N.S. ils rencontrèrent Mr. David N. Cosert, un avocat, représentant de la Compagnie Poseidon Line à Hambourg. Le capitaine Hans Eric Ludwig, Inspecteur en chef de la Poseidon Line était déjà au-dessus de l’Atlantique en route pour Sydney.

Le navire postal « Ile de Saint-Pierre » qui se trouvait à Sydney prit à son bord toutes ces personnalités, qui pendant le voyage purent obtenir des précisions supplémentaires concernant l’échouage du « Transpacific ». Pendant la traversée Sydney-Saint Pierre un télégramme fut adressé aux personnes responsables se trouvant à bord du bateau postal, que le gouvernement français rendait responsables les assureurs du navire échoué, des dommages qui seraient causés par la pollution sur le littoral des îles. On savait de source sûre à Saint-Pierre que le « Transpacific » avait dans ses soutes 4oo tonnes de bunker (huile Diesel) et d’huile lubrifiante. Immédiatement une action de pompage par barges fut suggérée.

Il y avait un autre problème urgent à résoudre, il s’agissait du transport des passagers. A cause de la brume persistante, l’avion ne pouvait atterrir. Une suggestion fut émise concernant une éventuelle escale spéciale du paquebot soviétique de 20,000 tonnes « Alexandre Pushkine », mais cette idée ne fut pas retenue. Un remorqueur de Terre-Neuve tenta de le renflouer, mais le navire échoué était trop monté sur les rochers et ce fut l’échec. A ce moment déjà le vapeur accusait une gîte assez importante.

Après l’arrivée de « l’Ile de Saint-Pierre », les personnalités officielles se rendirent à bord et après une longue et méticuleuse inspection, se consultèrent et décidèrent que le renflouement du « Transpacific » se révelait impossible. Le capitaine Spirling invita tous ses visiteurs à un grand dîner à bord de son bateau. Ce dîner fut en quelque sorte un dîner d’adieu, le « chant du cygne » du malheureux navire. Sur la grande table dressée dans la salle à manger, on mit les plus belles nappes, la vaisselle d’argent, les verres et coupes de cristal, et les meilleurs rumsteacks de la boucherie du bord. On sortit de la cave à liqueurs les meilleurs vins du Rhin, quelques bouteilles de bon Bourgogne et on termina par un « Mumm » de la meilleure cuvée. Ce repas de Lucullus fut vraiment le « nec plus ultra » de ce que l’on pouvait faire avec les moyens du bord. Après le repas, le chef mécanicien descendit dans la machine fermer les vannes d’alimentation des moteurs. Maintenant le grand navire n’avait plus d’âme, ce geste de l’officier mécanicien était le permis d’inhumer du navire échoué. Les experts considérèrent également que le débarquement de la cargaison entraînerait des frais considérables et conclurent qu’il fallait y renoncer.

Durant la nuit et toute la journée du lendemain, 70 doris de Saint-Pierre vinrent le long du bord et vidèrent littéralement les cales de toute la marchandise qu’elles contenaient, des meubles, des jukeboxes, des tondeuses à gazon, des vêtements et autres articles. Ces débardeurs occasionnels réussirent même à utiliser un des mâts de charge et à faire fonctionner les panneaux Mac-Grégor qui fermaient les écoutilles. Quatre jours après l’échouage du « Transpacific » le capitaine et quelques officiels de la Poseidon Line tentèrent d’embarquer à bord pour essayer de remettre on route les moteurs, ce qui aurait permis la remise en marche des pompes pour l’évacuation du mazout. Ces « sauveteurs » d’un nouveau genre, qui se trouvaient toujours à bord, enlevèrent l’échelle de pilote qui permettait d’accéder sur le pont du navire échoué. Le capitaine et ses collaborateurs ne purent donc embarquer et s’on retournèrent à terre fort mécontents. Immédiatement après son arrivée au port le capitaine Sperling déposa une plainte devant les autorités locales responsables. Celles-ci envoyèrent le petit bateau « Miquelon » monter la garde pour tenter d’arrêter ce que le capitaine allemand considérait comme le « pillage » de son bateau.

Pendant le déroulement de ces événements une note d’une grande gaieté, nous dirons même burlesque, fut apportée par la bouche d’un officier allemand. Devant le nombre imposant de tondeuses à gazon récupérées par ces « sauveteurs » zélés, il pensait qu’un commerçant de la place serait très avisé de commander pour les pelouses saint-pierraises un important stock de graines à gazon.

La Société « Atlantic Salvage and Dredging » du port de Halifax fut contactée et accepta de venir à Saint-Pierre pour résoudre le problème de la pollution. Walter Partridge, un spécialiste diplômé en matière de sauvetage en mer, arriva à bord de « Alma Griffin » avec un important matériel. Il amena avec lui un spécialiste de la plongée sous-marine, Fleming J. Vemb qui effectuait des plongées depuis l’âge de 12 ans. Son premier travail fut exécuté en tant qu’assistant de son grand père, ou les deux hommes sortirent 300 cadavres d’un navire allemand torpillé.

Partridge décida de brûler le « mazout » étant donné l’impérieuse nécessité de nettoyer de façon complète les cales de l’épave. Les bancs de pêche fréquentés par les pêcheurs locaux étaient à proximité du navire. Il fallait donc nettoyer de façon rationnelle pour éviter toute pollution.

Le reste de la cargaison était sous l’eau, barres d’aluminium, billes de bois, etc. etc.. Partridge et son équipe pratiquèrent de larges ouvertures sur les dessus des réservoirs à mazout. Une sorte d’énorme « matelas » fut confectionné avec du bois, plusieurs couches de foin sec, de nouveau du bois et des matériaux inflammables tels que pneus de caoutchouc, l’ensemble imbibé de mazout et d’essence. Une longue mèche très sèche reliait le matelas à l’extérieur. Trente trous furent percés dans la coque pour servir de cheminée d’aération. Enfin quand tous ces préparatifs furent terminés, on alluma la mèche. Une formidable explosion déchira l’air et une énorme flamme suivie d’une épaisse fumée sortit du « Transpacific ». Pendant 61 heures les flammes labourèrent les flancs et les superstructures du pauvre navire. Pendant ces trois jours que dura l’agonie du bateau, une brise favorable de Sud-ouest chassa la fumée en direction de Terre-Neuve. Le feu s’arrêta faute d’aliment. La très petite quantité de mazout qui restait dans les fonds fut entièrement enlevée par 90 gallons (400 litres) de produits chimiques. La brume très épaisse dura dix jours. Les onze passagers et les trente-deux membres d’équipage partirent à Terre-Neuve par la vedette à passagers « Béothie ». Ils furent ensuite dirigés via Gander sur Montréal et l’Europe.

L’opération antipollution terminée, il fut possible de récupérer la totalité des billes de bois et des barres d’aluminium, un puissant élévateur, plusieurs centaines de barils métalliques pour mettre de la bière et cinquante barils de miel, quelques apparaux de mouillage tels que ancres et chaînes.

L’épave du « Transpacific » resta entière pendant les mois d’été, mais les grandes tempêtes d’automne brisèrent le navire en trois parties. L’avant alla s’échouer sur la grève du Cap Beaudry à l’Ile aux Marins, la partie centrale constituée par la machine et la timonerie, resta sur le haut-fond et résista longtemps au travail de laminage quotidien de la mer. Enfin la partie arrière glissa et coula à l’accore du haut-fond.

Une fois de plus la preuve était faite qu’un bateau de construction récente, doté d’un équipement moderne très sophistiqué, monté par un état major compétant et un équipage expérimenté, pouvait devenir de nos jours encore la victime de cette terrible « gueuse » que certains rêveurs s’obstinent et persistent à désigner du nom de berceuse aux flots bleus.

03/11/1970 : Pascal-Annie, Cormorandière

  

Le 3 novembre 1970 le temps est beau et le vent nul, ce qui est assez rare a cette époque de l’annee. Monsieur Georges Haran, capitaine et armateur du « Pascal-Annie », part effectuer une extraction de sable dans l’Anse à Philibert, ainsi qu’il a coutume de le faire depuis plusieurs annees. En plus de ce travail, le « Pascal Annie » assure le service inter îles entre Saint-Pierre et l’Ile de Miquelon-Langlade. Pendant la saison estivale ce bateau fait un service quotidien de passagers entre Saint-Pierre et Fortune dans l’Ile de Terre-Neuve.

Une heure environ après être arrivé dans l’Anse à Philibert, le vent s’oriente au Sud-Est très doucement. L’extraction se poursuit pendant plusieurs heures; au moment où elle se termine, le vent souffle déjà fort de l’Est-Sud-Est et le ressac s’amplifie très vite sur la grève. Au moment d’appareiller, le moteur tarde à démarrer et le « Pascal-Annie » talonne une première fois. Voyant que la machine ne répond pas, le capitaine Haran demande de l’aide car son bateau talonne de plus en plus fort sur les rochers.

Deux bateaux partent immédiatement pour aider le camarade en difficulté. Il s’agit du « Diamant », capitaine Joseph Poirier, et de la « Cormorandière », la vedette des Phares et Balises, commandée par Charles Tillard. Le « Diamant » réussit parfaitement sa prise de remorque.

Il n’en est pas de même pour la « Cormorandière ». Au moment de la prise de remorque, celle-ci prend dans l’hélice de la vedette qui vient se coller au « Pascal-Annie ». Le vent augmente d’intensité et malgré la bonne volonté et la ténacité du patron du « Diamant », il ne peut dégager les deux bateaux échoués.

Il est obligé de larguer sa propre remorque et de revenir au port. Le sort des deux bateaux est scellé: c’est la mer, maintenant en furie, qui aura le dernier mot. Les deux équipages évacuent le bord avec quelques difficultés. Pendant plusieurs jours ce fut une lente agonie pour ces deux bateaux qui ne voulaient pas mourir. Le perte du « Pascal-Annie » fut particulièrement ressentie dans les Iles, et de nos jours, nombreux sont les Saint-Pierrais qui regrettent de ne plus voir la familière silhouette de ce bateau qui rendait de si grand services à notre territoire.

06/04/1969 : Charles L

Le « Charles L » était une petite goélette qui appartenait à l’armement Petite and Son C0 de English Harbour Ouest, un petit port de la côte sud-ouest de Terre-Neuve. Construit aux environs de 1920, il avait navigué sur les côtes canadienne et américaine pendant toute la période de la prohibition. Au début de l’annee 1969, il fut vendu à un groupe constitué de producteurs de télévision de la ville de Toronto, Canada.

Les nouveaux propriétaires prirent possession du « Charles L » au début du mois d’avril 1969. Ils le rebaptisèrent « Amarantine ». A l’aube du 6 avril le « Charles L » quitta le port de English Harbour en direction de Sydney où le bateau devait être réparé et transformé en yacht. Il y avait à son bord les deux frères du nouveau propriétaire, une jeune femme et un jeune élève officier de la base des Coast-Guard de Sydney, nommé Mac C. Purney. Cet équipage manquait totalement d’expérience.

Quand la voie d’eau se déclara, ils ne réalisèrent pas la situation dangereuse où ils se trouvaient. Et pourtant ils avaient pris connaissance du phare de Miquelon ce qui aurait du les inciter à chercher refuge dans cette localité. Ils avaient aperçu à plusieurs reprises le phare de l’île Verte, qui leur permettait de chercher abri dans la rade ou le port de Saint-Pierre. Malgré cela ils continuèrent leur route sur une mer déjà houleuse, avec des vents contraires et une mauvaise visibilité. La voie d’eau alla en s’amplifiant à tel point que les trois hommes furent obligés à tour de rôle de pomper vingt minutes par heure. De plus une assez forte tempête du sud-ouest s’amorçait et la visibilité était réduite à sa plus simple expression.

Enfin l’équipage réalisa que vouloir continuer le voyage équivalait à de la démence et décida de chercher abri dans le port de Saint-Pierre. Dans cette nuit noire avec un bateau qui avait une importante voie d’eau et un équipage non chevronné, c’était presque une gageure. Leur point estimé étant entaché d’erreur, la route qu’ils suivirent les mena tout droit sur les rochers de la Pointe de Savoyard, un des points les plus dangereux de la côte occidentale de l’île de Saint-Pierre.

En pleine nuit le bateau monta sur les rochers qui l’éventrèrent rapidement. L’équipage sauta à terre dans les secondes qui suivirent l’échouage. Une vague énorme empoigna le jeune élève officier qui fut vraisemblablement assommé et qui ne reparut pas. La même vague fit tomber à la mer la jeune femme qui aurait subi le même sort si un de ses compagnons ne l’avait attrapée par les cheveux et ramené sur la terre ferme. La jeune femme et ses deux compagnons d’infortune escaladèrent les gros rochers et réussirent à atteindre le talus ou ils se mirent un peu à l’abri d’un gros rocher. Toute la nuit ils errèrent aux environs avec l’espoir de voir apparaître leur jeune compagnon. Hélas, il ne revint jamais. A l’aube du lendemain, les trois infortunés, transis et très exténués, rencontrèrent un chasseur Monsieur Robert Puyol qui les fit monter dans son automobile et les ramena au plus vite dans un hôtel où ils furent réconfortés et hébergés.

Pour perpétuer la mémoire du jeune élève officier canadien, la base des CoastGuard de Sydney a fait ériger sur la falaise qui surplombe le lieu du naufrage une stèle relatant ce naufrage et précisant la fin tragique d’une jeune officier canadien plein d’avenir. Cette stèle fut inaugurée le 17 avril 1970, à la mémoire de l’élève officier Mac C. Purney, en présence du Gouverneur du Territoire, Monseigneur Maurer, l’Administrateur des Affaires Maritimes, un peloton d’élèves officiers canadiens et un peloton de la Gendarmerie de Saint-Pierre, ainsi que quelques personnes du monde maritime.

17/01/1965 : Bosworth

Photo. Michel Briand-Ozon
Photo. Bruce Dale

Le 14 janvier 1965, le cargo canadien « Bosworth » quittait un port de Terre-Neuve pour le port de Sydney où il allait chercher une cargaison de 1,000 tonnes de charbon pour le port de Bonavista – Terre-Neuve.

Dès la sortie du port, le « Bosworth » rencontra des vents d’ouest d’une extrême violence qui durèrent trois jours. Quand le bateau arriva à Sydney, l’équipage était rendu au dernier stade de l’épuisement. Le navire avait du retard sur son horaire et dès qu’il fut arrivé au port il prit sa cargaison en quelques heures. L’équipage n’eut pas le temps de récupérer, le jour même le « Bosworth » reprenait la mer. Cette fatigue excessive de l’équipage d’une part et la rapidité avec laquelle le navire avait été chargé, d’autre part, sont vraisemblablement liés avec la suite des événements concernant ce bateau.

Le 17 janvier il y eut une violente tempête et le « Bosworth » lourdement chargé fatiguait beaucoup. Une importante voie d’eau se déclara et les pompes furent mises en route. Très peu de temps après, la poussière de charbon boucha les crépines des pompes et la cargaison en se déplaçant dans la cale provoqua une forte gîte. A partir de ce moment, le capitaine eut les plus vives inquiétudes et il était convaincu que son pauvre bateau ne tiendrait pas longtemps. Etant parvenu à l’entrée de la passe sud-est de l’Ile de Saint-Pierre, le capitaine pensa que la meilleure chance de sauver son navire était de l’échouer à un endroit propice à un éventuel renflouement. Il échoua donc son bateau sur la grève à l’intérieur de la pointe du Cap Noir.

L’équipage de neuf hommes, qui fut aidé par un grand nombre de Saint-Pierrais réussit à se sauver avec d’assez grandes difficultés.

Quelques jours se passèrent sans trop de dommages pour le bateau échoué sur la grève. Cependant le vent vint à souffler du large, amenant une forte houle qui défonça la coque du vapeur. Le charbon sortit du bateau et se propagea sur une grande partie du littoral. Certaines personnes au prix de grands efforts réussirent à en récupérer une assez grande quantité qui fut très appréciée pendant les mois d’hiver.

De nos jours, les promeneurs qui fréquentent la route de Galantry peuvent voir encore les vestiges de ferraille, seuls souvenirs de la coque du cargo « Bosworth ».

21/12/1963 : Douala

Quelques heures après le naufrage de la goélette « Mary-Pauline », un autre bateau se trouvait en difficulté au large de nos côtes. Il s’agissait du cargo français « Douala » de 2,333 tonnes de la Compagnie de Navigation Fressinet et Cyprien Fabre, de Marseille. A cette date, ce navire n’aurait pas dû se trouver dans ces parages, mais par suite de son trop long séjour dans la région des grands lacs canadiens, le navire avait un mois de retard sur son horaire. D’après les renseignements recueillis après le naufrage il ressort que le commandant du « Douala » était un marin habitué à naviguer dans les mers tropicales et ses connaissances de l’Atlantique nord en hiver étaient très faibles. Dès le début de l’effroyable tempête il eut de graves avaries à cause de sa trop grande vitesse. La perte de ses panneaux de cale en était un signe certain. La cargaison se composait en partie de grains et de diverses marchandises. Quand les panneaux de cale furent enlevés, les pompes ne purent étaler l’entrée de l’eau. De plus, le grain boucha les crépines des pompes et certainement ce fut un des facteurs déterminant la perte du navire. Immédiatement après la réception des messages de détresse lancés par le « Douala », de très grands moyens furent employés tant par des bateaux que par des avions. Un de ces avions signala que les vagues avaient une hauteur de 22 mètres. De plus la température était de l’ordre de – 15° Celsius.

Un bateau canadien, le « Sir Humphrey-Gilbert » et deux bateaux français du port de Saint-Pierre, le « Rodrigue » et le « Langlade » commencèrent les recherches pour tenter de retrouver les 29 hommes qui se trouvaient dans deux chaloupes. Mais dans une mer aussi démontée c’était ce qu’on appelle « chercher une aiguille dans une botte de foin ».

Toute la journée et toute la nuit suivantes, malgré les grains de neige qui rendaient la visibilité nulle, les courageux bateaux continuèrent leurs recherches et leur veille dans des conditions très dures. Le 22 décembre vers 3 h 45, le « Rodrigue », commandé par Gérard Detcheverry, dont le radar était en panne, patrouillait à une vitesse de trois nœuds, le cap au 260. Soudain, entre deux grains de neige, une fusée rouge fut aperçue très bas sur l’horizon. Quelques minutes plus tard deux autres fusées de même couleur furent aperçues de nouveau par le « Rodrigue ».

Le chalutier diminua de vitesse en se dirigeant dans la direction où les fusees avaient été aperçues. Le capitaine du « Rodrigue » lança immédiatement un appel à tous les navires et à toutes les stations à l’écoute. Plusieurs bateaux accusèrent réception du message ainsi que les bases aériennes de Terre-Neuve qui avisèrent le « Rodrigue » que les avions se préparaient à se rendre à la position signalée.

Les recherches continuèrent inlassablement mais vainement. Quand le jour vint, la visibilité était nettement meilleure que la veille, mais hélas les équipages des bateaux sauveteurs n’apercevaient rien à la surface de la mer. Plusieurs navires rallièrent le chalutier, en particulier le « Sir Humphrey-Gilbert » appartenant au « Canadian Department of Transport », qui s’entretint en phonie avec le « Rodrigue ». Les avions arrivèrent sur les lieux et commencèrent méthodiquement à décrire des cercles en fouillant la mer à très basse altitude. Toute la matinée se passa en recherches sans apercevoir la moindre épave. A 13 heures l’avion coastguard 1347 indiqua en phonie qu’il venait de repérer une épave à 6 milles dans le sud. Le « Sir-Humphrey-Gilbert » qui était le plus près de la position indiquée fonça dans cette direction. Quelques minutes plus tard ce bateau signalait qu’il venait de recueillir quinze survivants d’une baleinière du « Douala ». Le capitaine du bateau donna ordre de mettre le long du bord plusieurs filins pour permettre de monter à bord, mais les pauvres malheureux étaient tellement extenués qu’ils n’y arrivaient pas. Durant cette opération deux hommes furent écrasés entre la baleinière et le bateau sauveteur. Quand les rescapés furent à bord, le capitaine signala que l’état des naufragés l’obligeait à regagner Port aux Basques de toute urgence où les rescapés recevraient tous les soins que nécessitait leur état.

L’avion 1347 demanda au « Rodrigue » de se diriger vers la chaloupe car il y avait encore deux cadavres à bord. Le chalutier recueillit les deux corps puis il embarqua la chaloupe sur son pont.

Les avions et les autres bateaux continuaient toujours les recherches pour retrouver la seconde chaloupe. Vers 16 heures l’avion 1347 appela en phonie le « Langlade » commandé par un autre Saint-Pierrais, Pierre Albert Fouchard, et lui signala qu’il venait de repérer une épave dont il lui indiqua la position. Le « Langlade » força sa vitesse et au bout d’un moment aperçut une chaloupe. En arrivant près de l’embarcation, l’équipage du « Langlade » constata qu’il y avait trois hommes dans la chaloupe: un était mort et les deux autres qui vivaient encore étaient dans un tel état que leur sauvetage devait être effectué de toute urgence. Le capitaine du « Langlade » en marin expérimenté se rendit compte immédiatement que son bateau, qui était muni d’une « ceinture » et qui roulait énormément, ne lui permettait pas de procéder à un sauvetage rapide des deux hommes; il demanda au « Rodrigue » de venir de toute urgence.

Le chalutier, tel un bon chien de Terre-Neuve, fonça une fois de plus et recueillit les deux malheureux qui n’auraient pas survécu longtemps. Le cadavre fut embarqué à bord du « Rodrigue » et les deux bateaux mirent en route à toute vitesse pour rallier Saint-Pierre.

Les deux rescapés furent soignés et réconfortés à bord du « Rodrigue » et au bout de quelques minutes ils purent prononcer quelques mots. C’est alors que le drame apparut dans toute son horreur.

Les deux rescapés expliquèrent qu’au moment de quitter le bord dans la seconde chaloupe où avaient pris place douze hommes, le croc d’un des palans se décrocha. La chaloupe suspendue par un seul palan vint à la verticale, se vida en précipitant les occupants à la mer. Trois purent se maintenir dans la chaloupe qui, libérée de son palan, s’écarta, à demi immergée, du bateau qui s’enfonçait.

Les deux bateaux arrivèrent à Saint-Pierre le 23 décembre vers deux heures du matin. Ce n’est qu’après l’arrivée au quai que l’un des cadavres put être identifié. Il s’agissait d’un jeune Saint-Pierrais de 27 ans, Michel Roulet, brillant officier, Capitaine de la Marine Marchande, qui occupait à bord du « Douala » la fonction de second-lieutenant.

Les quinze autres rescapés évacués sur Port-aux-Basques étaient en bonne santé. Parmi eux se trouvait un jeune Saint-Pierrais, Etienne Rebmann. Les deux autres rescapés furent soignés à l’hôpital de Saint-Pierre et aux dernières nouvelles leur état de santé ne causait pas d’inquiétude, encore que pour l’un d’eux, il faudra peut-être pratiquer une amputation. Voici le bilan de ce drame de la mer: sur un équipage de 29 hommes, il y eut 17 survivants, 12 hommes sont morts ou disparus parmi lesquels:
le Commandant, l’Officier en second, le 1er Lieutenant, le 2ème Lieutenant, l’élève officier, l’Officier radio, le 3ème Mécanicien, le Cuisinier, l’aide de cuisine et trois membres de l’équipage.

Les avions et tous les bateaux qui participèrent aux recherches effectuèrent un travail splendide au prix de difficultés inouïes. Les deux bateaux de Saint-Pierre se distinguèrent particulièrement, ce qui leur valut d’être félicités et remerciés par Monsieur le Ministre de la France d’Outre-Mer et par Monsieur Morin, Secrétaire général à la Marine Marchande, dans des télégrammes adressés è Monsieur Jacques Henry, Gouverneur des îles Saint-Pierre et Miquelon.