Décès de Monseigneur Maurer dans sa 78ème annee (né le 7 mai 1922), Evêque de l’Archipel depuis 1948.
Hommage à Monseigneur Maurer…
du Député Gérard Grignon
Nos mémoires d’enfants sont peuplées d’images particulièrement fortes qui y demeurent gravées. J’ignore les raisons exactes qui font que certaines de ces images disparaissent à jamais dans les abysses de notre inconscient et que certaines autres animent régulièrement l’écran de notre conscience claire.
Mais je sais que je devais avoir six ou sept ans lorsque ma mémoire d’enfant a fixé pour la vie la silhouette dynamique d’un jeune prêtre nouvellement arrivé avec son regard bleu et une profonde cicatrice sur le cou qui me fascinait. C’était François Maurer, un nouveau prêtre qui venait dAlsace nous disait-on.
Je n’aurais jamais imaginé à cette époque que plus tard, beaucoup plus tard, je me serai retrouvé ici en Alsace ce matin à Bernardvillé et devant sa maison de famille et dans cette église de Molsheim pour rendre un dernier hommage à cet homme devenu Evêque et qui a tant fait à Saint-Pierre et Miquelon.
Tant fait pour l’éducation, les loisirs de la jeunesse. Tant fait pour l’enseignement catholique.
En tant qu’enseignant et directeur du Collège Saint-Christophe, à l’origine du mouvement Scout et des Coeurs Vaillants, lançant de nombreux camps de vacances à Langlade et l’Ile aux Marins.
Tant fait pour l’enseignement catholique dont il fut le patron jusque l’an passé sachant défendre les intérêts de ses personnels tout en entretenant de solides et cordiales relations avec l’enseignement public.
Tant fait pour l’enseignement catholique encore dont il fut le bâtisseur ou le rénovateur: le Collège Saint-Christophe, l’Ecole Sainte Bernadette, l’extension de l’Ecole Sainte Croisine, la construction de la Salle des Sports de la Mission Catholique et l’Ecole Sainte Odile, sa dernière grande réalisation. Tant fait pour le catholicisme, bien sûr, auprès d’une population qu’il a rassemblée en permanence dans les différents lieux de prière et de recueillement qu’il a également rénovés ou construits : la cathédrale de Saint-Pierre dont la façade et le clocher sont de pierre, oeuvre d’un artisan venu d’Alsace, marque éternelle de sa région plantée là, religieusement en plein coeur de la ville, la Chapelle Sainte Bernadette, la Chapelle de Langlade, l’Église de Miquelon, l’Église de l’Ile aux Marins, les nombreux pèlerinages.
Tant fait pour défendre l’Archipel également dont la raison d’être, l’unique activité productrice, se trouvait étranglée par un Canada qui lui refusait les quotas de morue et l’accès aux zones de pêche traditionnelle.
François Maurer n’a pas hésité à joindre la tête du mouvement de protestation et de soutien rassemblant l’ensemble des populations de Saint-Pierre et de Miquelon à trois reprises, à des périodes extrêmement chargées d’émotion collective, et cruciales pour l’économie de l’Archipel. Il a tant fait pour l’Archipel disais-je. Oui, on peut parler de l’oeuvre de l’Evêque François Maurer à Saint-Pierre et Miquelon, en terre française d’Amérique du Nord.
Ton nom François Maurer est définitivement inscrit dans l’Histoire de l’Archipel.
Ton nom François Maurer est définitivement gravé dans nos mémoires. Dans nos mémoires mais aussi dans les coeurs des Saint-Pierrais et des Miquelonnais. Tu fais partie de la famille, tu es intimement lié à l’Archipel. Alsacien certes, mais aussi et combien intensément Saint-Pierrais et Miquelonnais.
Lors de mes derniers entretiens avec toi et en particulier à l’Hôpital Saint-Joseph à Paris, je t’ai senti anxieux, inquiet face à la maladie qui annonçait le grand départ. Sans doute était-ce l’amour de la vie, l’attachement à l’action menée et que tu voulais tant continuer, qu’il te peinait de quitter plutôt que la crainte d’affronter la mort.
Et puis Evêque, tu nous as si souvent rassemblés dans ta cathédrale, tu nous as si souvent dit dans des circonstances particulièrement dramatiques et douloureuses que la vie continuait, que celui ou celle qui nous quittait était là-haut quelque part, nous attendait et que plus tard, nous nous retrouverions tous. Tu nous l’as si souvent dit, François.
Aujourd’hui, c’est toi qui es là, c’est toi qui nous quittes. C’est pour toi que la population de l’Archipel tout à l’heure dans ta cathédrale, de l’autre côté de l’Atlantique priera, toi qu’elle considère comme l’un des siens car au-delà des liens, fruit d’une oeuvre qui est grande, tu as su créer les liens les plus forts qui existent en ce monde, ceux qu’aucune puissance ne peut anéantir, que la modernité même dans cette époque dite de communication ne remplacera jamais : les liens des contacts humains, les relations vraies, les liens du coeur.
Bon voyage Evêque François et au revoir, ailleurs là-haut, toi qui as rassemblé si souvent les Saint-Pierrais et les Miquelonnais, toi qui unis aujourd’hui l’Alsace et Saint-Pierre et Miquelon dans ton inassouvissable pulsion de bâtisseur, par cette passerelle virtuelle mais ô combien réelle qui marie le coeur et la foi par dessus l’océan.
de Georges Poulet
Une infinie tristesse… que dire d’autre en apprenant le « rappel à Dieu » de Monseigneur François Maurer, de l’Ordre des Spiritains, le 5 avril dernier, dans son Alsace natale, après des mois de maladie stoïquement (et chrétiennement) supportée, depuis son évacuation, lors de la visite du Président de la République, le 7 septembre 1999.
Il y a presque quatre ans, l’Archipel commémorait le 25e anniversaire de son épiscopat, et le 48, de son arrivée dans nos Iles. A cette occasion, l’Echo des Caps, du 24 mai 1996, avait retracé les étapes de l’apostolat d’un jeune Alsacien continental, qui rêvait de missions africaines et qui s’était retrouvé dans ces îles qualifiées par Chateaubriand de « Cyclades du Nord ». « L’homme propose, Dieu dispose », c’est le cas de le dire.
Il est venu, il s’est adapté, il est resté, participant désormais aux heurs et malheurs, accompagnant la joie et la souffrance, la crise et l’abondance, la jeunesse et la vieillesse, le travail et la retraite. Sans jamais se départir d’une rigoureuse neutralité politique, il se trouve associé à tous les grands événements locaux, et particulièrement lors de la crise de la pêche, en février 1988, où l’on se souviendra de sa formule lapidaire lors d’une manifestation au premier rang de laquelle il figurait : « Nous sommes une minorité, pas une médiocrité ».
Ardent prédicateur de la foi qui l’animait, directeur de l’enseignement confessionnel, il respectait strictement les principes républicains. Et ce fut lui-même qui me répondit lors d’une réunion de la section locale de la Légion d’Honneur sur « les valeurs » :
– « Les valeurs ? Mais ce sont celles de la République : Liberté, Égalité, Fraternité ».
En fin de parcours, il avait mis l’accent sur « l’espérance », et c’est bien compréhensible. Outre son caractère résolument optimiste, cette espérance était profondément ancrée dans sa foi religieuse. Témoin cette « Imitation de Jésus-Christ » qui avait bercé sa jeunesse – et la mienne – et dont il me donna un exemplaire dédicacé avant son départ.
« Si ton espérance est tellement forte et patiente, alors ton coeur est préparé à l’éventualité d’en supporter davantage, et te sera donnée l’espérance indéfectible de revoir Ma Face dans les cris de joie ».
Adieu, Monseigneur François Maurer ! Toutes et tous, croyants, incroyants, agnostiques, auront eu pour vous une pensée émue.
Ils savent bien que, où que vous puissiez être, de votre terre natale aux horizons d’outre-Atlantique, vous continuerez à poser votre regard sur nos îles qui ont porté votre destin.
d’Albert Pen
Qu’ajouter d’autre après ces fortes lignes de notre doyen ?
Presque tout ayant déjà été dit, peu de choses, si ce n’est, avec l’ensemble de la population, pour saluer la mémoire de celui qui accéda au titre d’Evêque l’annee même où j’arrivais moimême à la Mairie.
Depuis, nous avons entretenu d’excellentes relations, et chacun a souligné avec raison, la participation de Mgr Maurer aux luttes des élus pour la survie de l’économie locale, le défilé dont il prit la tête, son déplacement à TerreNeuve pour y accueillir les « arraisonnés », etc.
Comme l’écrit M. Poulet, Mgr Maurer était un optimiste, vivant dans la « joyeuse espérance » comme il aimait à le dire. Le mécréant que je suis aurait plutôt tendance, lui, à craindre que cette espérance ne s’assimile hélas à la célèbre « méthode Coué ». Et malheureusement pour le disparu comme pour nous, malgré ses efforts et les nôtres, les poissons persistent à devenir aussi rares que les fidèles sur des bancs devenus, au fil des annees, de plus en plus clairsemés dans la cathédrale.
Certes, « il n’est pas nécessaire d’espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer », et notre Evêque nous a justement appris à ne pas baisser les bras, luttant jusqu’au bout avec courage contre la terrible maladie qui devait l’emporter.
Je regrette pour ma part, que les autorités dont il dépend ne l’aient guère accompagné dans ce combat, le laissant épuiser ses dernières forces sur place au lieu de lui accorder de revoir plus longtemps sa chère Alsace.
du Maire et Président du conseil Général Marc Plantegenest
Très touchés par la nouvelle du décès de Monseigneur Maurer, Evêque de Saint-Pierre et Miquelon, le Conseil Général de l’Archipel et le Conseil Municipal de Saint-Pierre expriment à sa famille et à ses proches leurs sentiments de profonde sympathie.
La mémoire de Monseigneur Maurer, qui partagea pendant cinquante ans la vie des Saint-Pierrais et Miquelonnais, restera à jamais gravée dans leurs coeurs.
de la Fédération des Associations d’Accueil de Marins
La Fédération des Associations d’Accueil de Marins tient à saluer la mémoire de Mgr François Maurer, Evêque des Iles Saint-Pierre et Miquelon, décédé le 5 Avril à Wolxheim en Alsace, sa province natale.
Durant son ministère dans ces îles, perpétuant la tradition de la « maison de famille » des Oeuvres de Mer, il a, avec foi et ténacité, assuré l’accueil des nombreux marins pêcheurs de toutes nationalités, fréquentant les bancs de Terre-Neuve, dans le foyer Stella Maris, dont il avait agrandi et rénové les locaux.
Durant la crise de la pêche, consécutive aux mesures canadiennes de limitation des captures et à la délimitation des zones économiques, il a toujours affirmé, fort et clair, sa solidarité avec les marins pêcheurs de l’Archipel et son espérance dans le renouveau de cette activité.
Dans ces tristes moments, la Fédération assure sa famille, sa communauté, à Saint-Pierre et Miquelon et en Alsace, de toute sa sympathie.