Par une aveuglante tempête de neige, le schooner terre-neuvien Mary Wiscombe se jeta sur le rivage à Cap Coupé, au pied des falaises rocheuses de Langlade. L’absence totale de visibilité, la force de la tempête et l’impossibilité pour le navire de maintenir son cap furent les raisons du naufrage. Il était parti de Fortune le même après-midi, en direction de North Sydney, en Nouvelle Ecosse. Ecoutant la météo de sept heures du soir, il enregistra des prévisions de fort vent de sud-est avec des vitesses de 35, 40 nœuds. La mer était très dure et la visibilité presque nulle, ce qui amena le capitaine William Fawrell à mettre le cap sur Saint Pierre pour y trouver un havre sûr. Une demi-heure plus tard, un bruit de tôle écrasée se faisait entendre et le capitaine comprit que son gouvernail avait été brisé. Le schooner était solidement accroché aux rocs à peu de distance de la terre. Le doris mis à la mer par l’équipage ne résista que quelques secondes à la violence des vagues. Une autre vague plus puissante porta le Wiscombe encore plus haut sur le rivage;
« ce qui permit aux hommes et à moi-même de quitter le bord en sautant de rochers en rochers. Deux de mes hommes glissèrent et tombèrent à la mer qui les entraîna sous la coque du navire. Je fus assez heureux de pouvoir les repêcher tous les deux et de les ramener sur la terre ferme.
Tous les cinq nous avons fait l’ascension de la falaise et nous nous sommes dirigés vers les bois ou nous avons passé la nuit. Nous étions tous trempés. Au cours de la nuit il est tombé de la pluie, de la neige et il a gelé. Le lendemain à l’aube, j’ai décidé que nous tenterions de gagner le Phare de la Pointe Plate. Albert Hillier qui était tombé à l’eau, souffrait beaucoup de la jambe et n’était pas capable d’effectuer une si longue marche. Il en était de même de George Brushett. Tous deux sont restés dans le bois à attendre que nous puissions revenir avec du secours. Thomas Walsh, Charlie Scott et moi-même, nous sommes partis pour Pointe Plate. Nous avons traversé un petit ruisseau. Après une marche très épuisante de dix heures, nous avons découvert une petite cabane. Charlie Scott qui était complètement exténué, est mort très peu de temps après être entré dans la cabane. Nous avons réussi à faire un feu et nous avons trouvé du café et du sucre. Nous avons passé la nuit dans la cabane. Le lendemain matin 28 décembre, nous avons pris la décision de continuer en direction de la Pointe Plate. Finalement nous sommes arrivés le lendemain après-midi à trois heures chez les gardiens du phare après avoir marché pendant sept heures. A la Pointe Plate nous avons été accueilles charitablement par les gardiens qui nous ont réconfortés et nous ont donné a manger. Immédiatement ils ont avisé Saint-Pierre en téléphonie, du naufrage. A six heures du soir la même journée, le M/V « MIQUELON » est arrivé à Pointe Plate pour nous chercher, Thomas Walsh et moi-même et nous a ramenés à Saint-Pierre. En même temps le petit bateau « Saint-Fugene » est allé récupérer le corps de Charlie Scott pour le ramener à Saint-Pierre.
Je conclus ce rapport en déclarant que mon bateau le « Mary-Wiscombe » doit être considéré comme une perte totale.
Saint-Pierre 29 décembre l962. William Fawrell.
Les corps de Albert Hillier et de George Brushett furent retrouvés dans les bois par une équipe de Saint-Pierrais parmi lesquels se trouvaient les frères Vigneau.