Très tôt le matin du 21 novembre le chalutier espagnol « Pena Castillo » âgé de quatre ans, et d’un tonnage de 480 tonneaux avec son frère jumeau le « Guernika Ko Arbola » quittait le port de Saint-Pierre pour leur dernier voyage sur les Bancs de pêche avant de partir pour l’Espagne peu avant Noël.
Le « Pena Castillo » sortit le premier du port et après avoir débarqué le pilote, se dirigea vers le large. Quelques minutes plus tard le « Guernika Ko Arbola » à bord duquel se trouvait le pilote Jean Reux, capta un message du « Pena Castillo » annonçant qu’il venait de toucher sur un haut-fond, qu’une partie de sa quille était enlevée et qu’il menaçait de couler rapidement. L’équipage abandonna le bateau, dont l’avant flottait encore grâce à ses ballasts, alors que l’arrière était déjà complètement submergé.
Le pilote Jean Reux et son matelot Georges Franché se dirigèrent très rapidement sur le lieu présumé du sinistre, mais ils ne trouvèrent aucune trace du chalutier et de son équipage. Cela ne les découragea pas car tous deux étaient des marins valeureux et expérimentés et ils continuèrent activement leurs recherches. L’œil fixé au radar ils inspectaient la mer avec beaucoup d’attention mais les recherches étaient très difficiles à effectuer, d’une part à cause de la brume épaisse, d’autre part à cause de tous ces « cailloux » qui gisaient dans le secteur et parmi lesquels il était très difficile de détecter de petites embarcations de sauvetage. Se fiant plus à leur instinct de marin qu’aux indications données par le radar, ayant tous deux une parfaite connaissance des lieux, ils se dirigèrent vers l’Ile Pelée (extrémité méridionale de l’Ile aux Vainqueurs).
Leur flair ne les avait pas trompés. Ils découvrirent avec terreur les trois petits canots à quelques mètres seulement des terribles brisants. Ils manœuvrèrent rapidement et réussirent juste à temps à retirer des dangers les naufragés voués à une mort certaine sans leur intervention. Tous les pêcheurs côtiers de Saint Pierre, en particulier ceux de l’Ile aux Marins, connaissent les dangers que représentent les alentours de l’Ile Pelée, par une mer houleuse et brume épaisse.
Le sauvetage des marins espagnols, effectué par Jean Reux et Georges Franché dans de telles conditions doit être considéré comme un exploit et rester dans la mémoire des jeunes générations. Au moment de l’embarquement dans les canots on constata la disparition du patron de pêche. Quelques jours plus tard l’épave fut repérée à environ 500 mètres dans le 138° près de l’île Pelée, gisant par 35 mètres d’eau.
Le 4 décembre 1971 les deux plongeurs Messieurs Prudence et Cordon penétrant à l’intérieur de l’épave du « Pena Castillo », retrouvent et ramènent le corps du marin disparu dans le naufrage de ce bateau le 21 novembre précédent. En reconnaissance de leur acte courageux le Gouvernement espagnol décerna aux deux braves marins Saint-Pierrais Messieurs Reux et Franché, la médaille de sauvetage le 25 novembre 1972.
La cause présumée du naufrage du chalutier fut une erreur de route dont doit être tenu responsable le girocompas.